Favoriseraient-ils l'apparition du diabète de type 2 ?
Les édulcorants ont un pouvoir sucrant et sont utilisés pour remplacer le sucre dans l'alimentation. Leur popularité s'appuie sur le fait qu'ils n'apportent pas (ou très peu) de calories. En effet, outre que certains édulcorants ont une teneur en calorie égale à zéro, tous sont utilisés à des doses extrêmement faibles en raison de leur pouvoir sucrant intense (généralement plus de 150 fois celui du saccharose).
Les édulcorants sont commercialisés pour donner un goût sucré à nos boissons ou préparations culinaires. Ils sont aussi largement utilisés par l'industrie agroalimentaire, notamment en raison de leur faible coût.
On pense évidemment immédiatement aux multiples boissons
édulcorées disponibles, mais de nombreux autres produits en contiennent également.
Parmi les édulcorants, on retrouve l'acésulfame K, l'aspartame, le cyclamate, le néotame, la saccharine, le
stevia et le sucralose.
D'autres substances sont aussi utilisées dans la confections des pâtisseries, chewing-gums et
bonbons : les polyols tels que le sorbitol, le mannitol, le malttol, le xylotol, etc. Ces produits
apportent ± 2,4 calories par gramme (4 pour le sucre alimentaire).
Les édulcorants ont été largement plébiscités au cours des dernières années, comme une des stratégies de lutte contre l'obésité: ce choix repose sur leur apport en calories nul ou très faible, favorisant un maintien ou une perte de poids. Des études ont été publiées, soutenant cette hypothèse.
Ils sont souvent proposés aussi aux personnes atteintes de diabète de type 2, pour contribuer à normaliser le poids et permettre l'usage de certains aliments au goût sucré.
Par ailleurs, on connaît le rôle des sucres dans l'apparition de la carie dentaire : les bactéries présentes en
bouche transforment les sucres et créent au cours de ce processus un environnement acide favorable à
l'attaque de l'émail dentaire et à la déminéralisation de la dent. La salive neutralise en partie ces processus,
mais le maintien d'une bonne hygiène buccale (brossage des dents principalement) est essentiel pour prévenir
les caries. Ici aussi, on évoque parfois l'avantage des édulcorants, qui ne sont pas transformés par les
bactéries buccales. L'usage de chewing-gums contenant des édulcorants est même proposé pour accroître la
salivation et contribuer ainsi à préserver les dents.
Cependant, des avis divergents se sont fait entendre, certains soutenant que l'usage d'édulcorants
maintenait l'attirance pour le goût sucré et allait à l'encontre de véritables changements dans les habitudes
alimentaires.
Or, il semble de plus en plus évident que l'action bénéfique potentielle de l'alimentation sur la santé
(prévention des maladies cardiovasculaires et de certains cancers notamment) passe avant tout par une
alimentation variée, proche du régime méditerranéen. Celui-ci est caractérisé par une faible consommation
de sucres.
Edulcorants: une hypothèse inquiétante
Récemment, des chercheurs ont publié les résultats d'une recherche dans la revue Nature.
Ces données doivent être interprétées avec prudence, car il s'agit au départ de constatations dans le cadre d'une expérimentation sur des souris adultes.
Certains animaux ont reçu de l'eau enrichie d'un des trois édulcorants suivants : aspartame, saccharine ou sucralose. Selon les groupes, une alimentation normale ou riche en graisses était donnée. Au bout de 11 semaines, les souris recevant des édulcorants présentaient une intolérance au glucose (élévation du taux de sucre dans le sang), un signe avant-coureur du diabète de type 2. Ce phénomène était absent chez les souris recevant de l'eau ou de l'eau sucrée. Autre constatation : en introduisant les selles des souris devenues intolérantes au glucose dans l'intestin d'autres souris, ces dernières devenaient également intolérantes au sucre.
L'hypothèse explicative proposée par les chercheurs est celle-ci : les édulcorants modifieraient l'équilibre
de la flore intestinale (le « microbiote »), en favorisant le développement de certaines bactéries ou en
inhibant d'autres. Ce déséquilibre favoriserait une augmentation du taux de sucre dans le sang.
On découvre progressivement les multiples fonctions remplies par le microbiote : synthèse de
la vitamine K, importante pour la coagulation sanguine ; digestion de certaines substances
(comme la cellulose des végétaux), ; régulation de l'épaisseur de la muqueuse intestinale ;
fonction d'appui au système immunitaire - qui permet la défense de l'organisme ; protection
contre la colonisation de l'intestin par des micro-organismes pathogènes. Certains
spécialistes considèrent que la flore intestinale est un organe à part entière.
Dans un deuxième temps, les chercheurs ont recruté des personnes volontaires, ne consommant habituellement pas d'édulcorants, et les ont soumises pendant 7 jours à un régime riche en édulcorant (tout en respectant les limites de doses journalières admissibles). Sur 4 des 7 personnes testées, les chercheurs ont constaté des modifications de la flore intestinale et une élévation des taux de glucose sanguin.
Le consensus en faveur de l'usage des édulcorants n'est donc pas unanime. Il est certain que des recherches
supplémentaires sont essentielles pour confirmer l'usage sans risque de ces substances.
En attendant ces résultats, il est sans doute prudent, pour une majorité de la population, de limiter la
consommation des produits édulcorés. La balance risques/avantages est sans doute différente si une perte de
poids rapide est importante en raison de problèmes de santé (hypertension artérielle, complications liées à
une obésité, etc). Mais dans ce cas, un accompagnement par un médecin et un diététicien est essentiel!
Références -J. Suez, T . Korem, D. Zeevi et al. Artificial sweeteners induce glucose intolerance by altering the gut microbiota. Nature (2014) doi:10.1038/nature13793.
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